L’avenir de la télévision, au-delà de l’expérience sociale

intonow

par Olivier Godest, publié le 24.04.2012

Au détour de ma veille sur Internet, j’ai découvert « The Future of TV is More Than Social, It’s Distributed and Always-On », un article de Brian Solis, également auteur du livre The End of Business as Usual. Ce billet m’a particulièrement interpellé car la vision de son auteur quant au futur de la télévision, me semble être la plus juste de toutes celles observées jusqu’ici. J’ai donc le plaisir de partager avec vous cette conception, tout en gardant bien évidemment l’esprit initial de Brian Solis.

 

 

 

Tout comme l’avenir des médias en général, l’avenir de la télévision se situe au delà du social. Quand on parle de social, on parle de tissu, celui reliant les nœuds individuels et composent le réseau humain. Mais il s’agit bien d’un moyen et non d’une fin en soi. Il en va de même concernant les théories sur la Social TV. Comprendre les usages des téléspectateurs et des consommateurs de programmes en général est indispensable pour parler de l’avenir de la télévision.

Nous avons la chance d’être dans une période très créative, laissant la place à une grande imagination : tant dans la conception, les scripts, ou encore dans l’innovation technologique. Nous nous devons donc d’élever la barre. L’avenir de la télévision ne sera pas uniquement lié à une stratégie de médias sociaux. L’avenir de la télévision sera axé sur l’innovation et sur une vision pour le divertissement plus significative en terme d’engagement. Cette innovation au coeur de la création inspirera les nouvelles programmations, les opportunités de revenus, et finalement, les stratégies de médias sociaux.

Chloe Sladden, Directeur des partenariats avec les médias chez Twitter : “Twitter permet de brancher les gens pour qu’ils se sentent dans une conversation en temps réel. A l’avenir, je ne peux pas imaginer un événement d’envergure où le public ne fait pas partie de l’histoire elle-même.”

En effet, le programme est l’événement. C’est l’épicentre de l’engagement. L’avenir de la télévision commence donc par définir la façon dont cet évènement est séduisant, captivant, et surtout, “partageable”.

Comment pouvez-vous élargir la portée d’un réseau, d’un programme, ou d’une personnalité au-delà d’une audience existante? Comment comptez-vous utiliser les médias sociaux pour être à l’écoute de votre public ?

Trop souvent, les meilleurs exemples de médias sociaux en matière de divertissement proposent de nouvelles façons de se connecter à ceux qui sont déjà connectés. L’objectif, dans chaque expérience étant toujours le même, à la fois dans l’approche créative et dans les développements technologiques. Les marketeurs ont d’abord cherché à utiliser les médias sociaux pour “sonder” leurs audiences et pour trouver de nouvelles manières de mesurer les effets des campagnes social media.

Bien que la télévision, les ordinateurs, les tablettes et les mobiles soient tous utilisés pour de la consommation de contenu, les consommateurs ont clairement fait savoir qu’ils ne souhaitaient utiliser que le PC et / ou le mobile/tablette en temps réel pour plus d’engagement… mais pas la télévision.

 

Le Medium est le Message et le Message est le Medium.

Le contexte propre à chaque device permet de réunir les téléspectateurs. La nature de l’évènement définit également les leviers de l’engagement. Nous ne pouvons pas supposer que le contenu et les canaux sont agnostiques. Ce que nous pouvons dire, c’est que les audiences sont désormais plus éparses. Chaque canal (broadcast, online,social) et chaque dispositif répondent à un objectif. Mais rien ne compensera jamais un programme ou un évènement qui n’est pas engageant par nature.

Quelques-uns des plus grands événements, comme le Super Bowl et les Grammys, ne gagnent finalement qu’une meilleure concentration de leur audience “live”. Ceci est en grande partie dû à la teneur de l’évènement, mais également aux conversations online qui font de cet évènement commun un moment propice à l’échange en temps réel. Que cette conversation soit alimentée par une peur de manquer (FOMO) ou d’un désir de partager l’expérience, les grands évènements live sont amenés à vivre la participation et à être conçu pour susciter l’engagement en ligne.

Référons-nous à la classe des consommateurs connectés en tant que Génération-C (The Connected Consumer). Il ne s’agit pas seulement de Gen-Y. Il s’agit de tous les consommateurs expérimentant ce nouveau style de vie numérique, ils ne sont pas seulement reliés mais incroyablement perspicaces. Ces consommateurs connectés n’attendent pas seulement du streaming online à la demande optimisé pour chaque appareil. Ils veulent s’engager dans chaque écran, de manière différente, et d’une manière dynamique. C’est là que vous entrez en jeu.

L’expérience nécessite une définition. Elle nécessite une architecture. Et l’infrastructure qui va venir soutenir cette expérience doit être souple et adaptable. Ce qui  nécessite de travailler à la fois sur la programmation, sur la partie mobile et social media, mais aussi plus spécifiquement sur l’engagement, le tout de manière épisodique et continu à la fois.

Aujourd’hui, nous assistons à des expérimentations sur les différents écrans avec des dispositifs incitant la participation du public. Certains programmes live diffusent désormais des citations issues des réseaux sociaux. D’autres événements en direct affichent des Tweets mais aussi des statistiques fondées sur l’analyse des médias sociaux. Certains intègrent directement la participation communautaire dans le contenu. D’autres utilisent les médias sociaux pour raconter des histoires complémentaires entre les saisons ou diffusent des webisodes spécifiques pour maintenir l’intérêt et le degré élevé d’attente entre les programmes. Les apps se développent également pour ouvrir de nouvelles fenêtres entre les programmes et les audiences mobiles.

Oui mais encore ?

Pour chacune de ces initiatives, nous devrions reposer les choses à plat, pour optimiser ces premiers travaux avec des objectifs plus élevés et avec une vision éclairée sur les nouveau rapports entre les spectateurs et le programme, le spectateur et les éléments du programme, le scénario et les personnages, le spectateur et l’écran, et entre les téléspectateurs eux-mêmes.

Il faudra d’abord répondre à ces questions:

- Quel est l’objectif et le but de votre initiative en Social TV ?
- Quel genre de relation espérez-vous, et comment allez-vous animer chaque canal en étant non seulement engagent mais aussi pertinent d’un point de vue narratif?
- A quoi ressemblerait votre “Top Tweet” et quelle serait l’étincelle sociale qui le déclencherait ?
- A quoi ressemble l’expérience sur un téléphone mobile, sur une tablette, un PC, ou à la télévision?

La programmation n’est que le commencement. La publicité est également une nouvelle occasion d’engager de manière plus significative.

Au delà d’un simple achat de secondes et d’une utilisation de spots de pubs pour promouvoir des campagnes de médias sociaux, des page Facebook, ou de hashtag Twitter, essayez plutôt de trouver de nouvelles manières de raconter une histoire qui peut vivre au-delà de sa partie publicitaire et sur de multiples médias.

Old Spice a compris que ses publicités étaient trop réussies pour être traitées comme de simples campagnes traditionnelles, qui démarrent… puis s’arrêtent. Les téléspectateurs ne “s’éteignent pas”, pourquoi une belle histoire ne pourrait-elle donc pas continuer de vivre sur d’autres plates-formes de distribution, où les consommateurs sont plus que disposés à s’engager ?

La nouvelle campagne Old Spice est devenu une expérience transmedia qui se ramifie au travers de multiples canaux de diffusion. L’histoire, le produit, et la série permettent dans leur ensemble de maintenir les spectateurs engagés. La série a également pour objectif de placer le specta(c)teur au coeur de l’histoire avec des vidéos personnalisés créés en fonction des commentaires et de la participation.

Le placement de produit pourra également être réinventé. En développant les produits/marques comme partie de la narration, les annonceurs ont de nouvelles possibilités pour raconter des histoires contextualisée sur de multiples plate-formes. Ils ont la capacité d’accueillir de nouvelles interactions, de bâtir des communautés ou encore de susciter plus fortement le désir du produit. Tout dépendra bien sûr de l’histoire et de l’expérience souhaitée par les publicitaires (et leurs annonceurs).

Le fait est qu’il ne faut pas mettre fin à la publicité classique, pas plus qu’il ne faut se limiter à un engagement défini à de nouveaux réseaux et plates-formes. Le stortytelling et l’engagement des consommateurs peuvent être sans limites si l’expérience proposée est  convaincante, agréable, et partageable. Mais là encore, il faut une vision différente soutenue par un but ou une intention irrésistible.

Grâce aux expérimentations, nous voyons quelles sont nos possibilités. Cependant, les réseaux classiques, les annonceurs et les producteurs doivent tous penser au-delà des technologies pour repenser avant tout à l’Expérience. En ne mettant pas l’accent sur l’expérience ou sur la nature des relations entre les spectateurs et les médias, nous mettons trop d’importance sur le développement technologique (quelque soit le support) au dépend d’une stratégie basée sur l’amplification des forces et qualités propres à ces plate-formes.

L’avenir de la télévision sociale n’est pas encore écrit. Il faut une vision. Il faudra de la créativité et de l’imagination. Il faudra de l’innovation. Plus important encore, il faudra de l’architecture dans les expériences pour engager, enchanter, et activer les spectateurs.”

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auteur Olivier Godest

Brand Manager #MIPCube @ReedMidem // Digital & Social Media Strategist, expertise Transmedia. Ex-Transmedia Lab. Plus d'informations sur www.olivier-godest.com