Rencontre avec Lazarus, protagoniste de l’expérience transmedia « Mirages »

Lazarus

par Vincent PUREN, publié le 13.04.2012

Lazarus, penseur sceptique anonyme, intrigue depuis quelques semaines avec l’expérience transmedia « Mirages ». Présent dans deux films, un site, une vingtaine d’éléments interactifs, un blog, les réseaux sociaux et un jeu, il pratique une narration qui a séduit le Transmedia lab. Nous avons donc décidé de décrypter ce « mouvement » qui, vous le verrez, a fait l’objet d’une orchestration millimétrée.

 

 

 

« Lorsque l’on me demande si je suis une personne ou si j’incarne un personnage, j’ai l’habitude de demander à mon interlocuteur si lui-même se considère comme une personne ou comme un personnage. » C’est sur ces mots que débute notre rencontre avec Lazarus, qui intrigue depuis quelques semaines un certain nombre d’internautes avec la campagne transmedia « Mirages », à la frontière du réel et de la fiction.

Ne le comparez pas aux Anonymous – même s’ils partagent certains intérêts et idéologies et qu’il compte sur le potentiel de la toile pour porter son message – car son identité et son message sont tout autre. Ce rationaliste est inspiré par des scientifiques, physiciens ou biologistes, à l’image de son travail de fond avec le collectif de recherche en esprit critique CorteX qui lui fournit toute la matière intellectuelle du projet « Mirages ».

Son action vise particulièrement la sphère médiatique. « Lorsque vous regardez le journal télévisé, si celui-ci vous était présenté par quelqu’un portant un masque et souhaitant rester anonyme, feriez vous confiance à cette personne et aux informations qu’elle vous apporte  ? ». Selon lui, cette situation résume bien la réalité. Nous connaissons l’apparence du présentateur de notre JT favori, son nom, mais tout cela ne nous donne aucune information sur sa réelle identité, sur son orientation politique, sa formation, son cercle d’amis et donc sa prise de recul sur certains sujets. « Cela ne nous dit rien sur comment l’information est produite, les sujets la manière de choisir les sujets » ajoute-t-il.  Finalement, son masque et son anonymat sont en quelque sorte une métaphore de cette question.

Son combat porte plus généralement sur l’« Information », cet ensemble de messages qui n’a de sens dans une démocratie que s’il devient possible de définir son origine – l’origine des personnes qui l’émettent ou la produisent – le chemin emprunté.  Il dénonce ainsi les manipulations médiatiques et s’attaque à ce qui lui semble être des illusions comme la pseudo-science, les superstitions,  mais aussi les pouvoirs de raison. L’homéopathie, la politique et l’astrologie sont d’ailleurs décriés dans les vidéos ci-dessous :

http://www.dailymotion.com/videoxqtfj6

 

http://www.dailymotion.com/videoxqtg35

 

http://www.dailymotion.com/videoxqtgl9

Le concernant, la question de l’anonymat a tout de suite semblé évidente. N’étant pas l’initiateur du projet « Mirages » mais son porte-parole ; on lui a proposé, à l’origine, d’apparaitre sous son vrai jour, ce qu’il a refusé, préférant mystifier sa personnalité. Il  a fallut par conséquent lui imaginer une apparence et lui trouver un pseudonyme. Le choix s’est porté sur Lazarus, un nom dont la genèse se révèle au cours des différentes étapes d’un jeu dédié sur son site internet, que nous vous invitons à découvrir pour en apprendre d’avantage sur ce personnage.

Selon lui, apparaitre et communiquer anonymement, sont fait partie de cette nouvelle culture numérique qui voit émerger des systèmes d’intelligence qui ne sont pas le reflet d’une mais d’un groupe de personnes.Anonyme et masqué, il ne manque pas de souligner cette posture en parlant à plusieurs reprises au pluriel.

A l’origine, l’idée était de financer un film sur le Rationalisme, mais les choses ont changé suite à la découverte de nouvelles formes d’écritures transmedia, qu’il décrit avec beaucoup d’enthousiasme comme «  une manière de raconter des histoires non plus avec une forme linéaire dans un objet fermé tel un livre ou un film, mais une manière de créer une architecture, un univers à l’intérieur duquel on va raconter une histoire en utilisant différentes plateformes en l’occurrence dans notre expérience : deux films, un site, une vingtaine d’éléments interactifs qui circulent sur la toile, un blog, , un jeu et des expériences dans le monde réel (pour bientôt). »

Cette approche lui permet d’éviter de tout centrer autour d’une même plateforme ou d’un même support et d’utiliser la toile d’araignée formée par ceux-ci afin de construire un univers ou le spectateur ne sera plus simple spectateur, mais un acteur capable d’interagir avec les développements proposés.

Travailler avec plusieurs plateformes lui a permis de toucher des publics hétérogènes, avec des niveaux d’intérêt, de curiosité et d’implications différents. Conscient que la multiplicité des profils est plus forte sur internet qu’ailleurs, Lazarus a décidé d’utiliser deux niveaux de lecture : le premier est ludique et destiné à la majorité du public et l’autre plus intellectuel, avec un niveau de complexité plus important, qui requiert un temps de lecture plus conséquent se destinant à un profil d’internautes plus « gourmand ».

Les heures d’entretiens avec les scientifiques du collectif CorteX diffusés sur sa Web TV Dailymotion et relayés sur les , constituent une base solide de réflexion. Il ne manquait plus qu’à crédibiliser celle-ci en s’appuyant sur des supports médiatiques puissants mais en adéquation avec ses valeurs pacifistes, humanistes ou encore féministes. Outre son partenariat avec Libération qui héberge un des blogs de Lazarus, OWNI fait office de partenaire stratégique car en parfaite corrélation avec les idéologies du personnage dont le lectorat constitue son cœur de cible. Cette liberté d’expression présente chez OWNI lui permet au nom des membres du collectif, d’exprimer son opinion sur différents sujets qui tendent à faire bouger les choses.

L’expérience ne fait que commencer, il est encore trop tôt pour réaliser un premier bilan, cependant Lazarus nous annonce avec surprise qu’il reçoit de nombreuses réactions d’internautes satisfaits de son action. Celui-ci s’attendait plutôt à subir des commentaires négatifs émanant de fervents défenseurs des sujets qu’il attaque, comme l’homéopathie ou l’astrologie, mais relativise en déclarant que les choses peuvent encore changer au fur et à mesure que la campagne prendra de l’ampleur.

Découvrez ci-dessous notre interview de Lazarus :

http://www.dailymotion.com/videoxqti1u

Pour conclure, une question mérite d’être éclaircie : celle de la véritable identité de Lazarus. Cette question reste sans réponse pour le moment mais nous vous encourageons à enquêter de votre côté et à nous faire part de la moindre de vos découvertes.

Quoi qu’il en soit, l’expérience est organisée sur une durée de 6 mois, autour de Lazarus, qui va revendiquer un hoax et communiquer sur la toile de façon régulière. Difficile de déterminer les ambitions finales de cette expérimentation, même si la sortie d’un film annoncé par Lazarus lui-même, semble une occasion d’en tirer bénéfice.

A part, éloigné des expérimentations de marketing transmedia que nous vous décrivons régulièrement, le projet « Mirages » démontre  l’intérêt pour des personnalités de tout horizon, qu’elles soient politiques, people, scientifique, de recourir à un storytelling transmedia pour véhiculer de nouvelles expériences ou univers et amplifier leurs prises de paroles. « Que la raison nous serve de guide ! »

 

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auteur Vincent PUREN

Passionné des nouveaux médias ainsi que des tendances numériques, j'ai rejoint l'équipe du TransmediaLab début 2012. Je suis également éditeur du blog Buzzmania depuis 2010 et rédacteur chez Presse Citron autour des thématiques de l'advergaming, des médias sociaux et de l'E-Business.