TRANSFORM@T LAB, Une pépinière de projets – Budapest Semaine #2

Image 1 - ideas take shape

par Oriane Hurard, publié le 13.07.2012

Trois villes, trois universités, neuf participants issus de cinq pays différents, quatre semaines de workshop intensif pour développer des projets transmedia innovants… Découvrez le programme du Transform@t Lab 2012 de l’intérieur ! Après une semaine off où chacun des participants a pu méditer sur les découvertes de la première semaine à Newport, tout recommence à Budapest. Chaleur étouffante et hospitalité à la hongroise : la semaine s’annonce intense et pour cause : à la fin de la session, les groupes et les projets devront être en ordre de marche.

 

 

BUDAPEST, LA RECHERCHE A LA POINTE

Dès le lundi matin, Zsòfia Ruttkay, directrice du Creative Technology Lab du MOME, l’université d’art et de design de Budapest, démarre la semaine en nous présentant les trois grands axes de recherche menés par son département : Book beyond print, Urban Games and Museum of the 21st century.
Parmi les projets présentés, on peut noter le projet de livre musical interactif Aunt Pepper, développé ici au MOME et auquel , l’étudiante du MOME participant cette année au TFlab, a collaboré.

Le livre est ici appréhendé comme un objet tactile, source de pédagogie ludique pour l’enfant. Ce projet y intègre la réalité augmentée ainsi que la technologie Kinect afin de permettre aux partitions écrites sur l’ouvrage d’être reconnues et lues par l’ordinateur, qui joue ainsi la mélodie concernée.

Autre projet présenté par une autre étudiante du département, Rooftops at dawn, roman littéralement adapté en un jeu urbain sous forme d’application smartphone. Cette application permet de lire le roman tout en se promenant physiquement dans la ville et en découvrant l’histoire de Budapest durant les années 30. Chaque lieu prédéterminé dans le parcours permet d’accéder à un chapitre de l’ouvrage (disponible en lecture simple ou en audio-guide) ainsi qu’à d’autres documents multimédia (archives photos et vidéos de l’époque, articles de journaux, etc).

 

Vidéo de présentation


Plus tard dans la semaine, d’autres professeurs du Creative Technology Lab, Àgoston Nagy et Bence Samu, nous proposeront également d’autres exemples d’interfaces et d’applications expérimentales, utilisant notamment la Kinect. Cet outil semble décidément s’imposer comme l’interface idéale aujourd’hui  pour favoriser l’interaction entre le virtuel et le spectateur-joueur.

 

Vidéo « The first five months with Kinect »

 

KITCHEN BUDAPEST, UN LABORATOIRE IDÉAL
Nous sortons de l’université et de ses recherches appliquées dès le deuxième jour, pour nous frotter au « vrai monde », ou presque. Située dans un quartier plutôt branché de la capitale hongroise, la Kitchen Budapest a un sol vert gazon et des mobiles étranges accrochés au plafond. Un verre de grenadine à la main, une souris dans l’autre, tous ses occupants ont le nez plongé dans leurs écrans, smartphones ou revues, affalés dans d’énormes fauteuils. Trois d’entre eux interrompent leur activité pour venir nous présenter pendant presque deux heures le fonctionnement et les projets de leur « cuisine ».
Fondé et financé par Magyar Telekom, le premier opérateur télécom de Hongrie, Kitchen Budapest, ou Kibu pour les intimes, se présente comme une véritable pépinière d’incubation pour projets, ébauches ou idées diverses.

Aujourd’hui composé d’une dizaine de coordinateurs et d’une vingtaine de jeunes chercheurs, Kibu existe depuis près de 5 ans et regroupe créateurs, designers et développeurs dans le même open space, afin de permettre à tous ces corps de métiers de se rencontrer autour de créations communes.

Les projets en question ne vivent parfois que quelques semaines, voire quelques jours ou quelques heures : le temps pour leurs créateurs pluriels d’expérimenter une idée, d’aller au bout de celle-ci et de l’abandonner sans frustration résultant d’un manque de moyens, de temps, ou de compétences – puisque tout cela est disponible ici.

Kibu est ainsi la parfaite conjonction entre start-up (pour l’esprit d’innovation qui règne dans les locaux) et laboratoire de recherche (pour l’émulation et la créativité). Soudain, tous les jeunes participants du TFLab se prennent à rêver de pouvoir un jour fonder, ou travailler dans un tel environnement pluridisciplinaire et multiplateforme. D’autres laboratoires de ce genre existent bien sûr en Europe et dans le reste du monde, et collaborent d’ailleurs très activement entre eux. A nos yeux favoriser – et financer ! – ce type de lieu constitue un des enjeux majeurs de la création et de l’innovation numérique française.
Parmi les projets présentés, on a pu noter deux domaines de recherche revenant très souvent sur le tapis : les questions de cartographie et de datavisualisation.

Ainsi, un des derniers projets sortis de la cuisine, Submap, s’intéressait à la représentation subjective d’une carte et plus particulièrement de la vision personnelle que l’on peut avoir d’une ville. Travaillant dès 2010 sur une carte personnelle et sensible de Budapest, les travaux de KIBU ont ensuite porté sur différentes villes et différentes fonctionnalités. La dernière en date, UrbanCyclr cherche à visualiser le trafic des vélos dans la capitale hongroise.

Plus éloigné de la cartographie mais s’intéressant également à l’espace urbain, Chromosonia permet aux passant de visualiser la musique qu’ils sont en train d’écouter sur leurs appareils mobiles de manière sensible et colorée, directement sur la façade du bâtiment. Les lumières changent ainsi de rythme et de couleur en fonction du genre de musique écoutée.
Enfin, The Subjective Atlas of Hungary, projet plus collaboratif que digital, a récolté et agrégé entre eux plusieurs sources d’informations, de créations (infographies, photos, dessins) grâce à une mise en commun de plus de cinquante contributeurs, formant par leur rassemblement une carte subjective du pays.

Edité sous forme d’ouvrage papier grâce à un partenariat avec une maison d’édition, ce projet illustre à la fois la force de la Kitchen Budapest, sa diversité, et sa faiblesse : impossible en effet pour eux de commercialiser eux-mêmes leur projet. Il semblerait même à les entendre qu’ils n’en éprouvent (presque) aucun regret, chacun des créateurs du projet étant déjà, depuis, passé à autre chose. A force de trop développer, on en perdrait l’envie d’entrepreneuriat ?

 

DE L’ÉMERGENCE D’UNE IDÉE A UN PROJET PITCHÉ

Après la découverte et l’exploration des projets des autres, vient la période de notre propre développement. A nous de créer !
Plus tôt dans la semaine, l’équipe de mentors qui suit les participants depuis Newport a tenté de lier libre-arbitre et complémentarité pour former les groupes de projets. Entre aspirations personnelles, affinités et compétences à assembler, les trios ainsi créés semblent plutôt en accord avec les envies de chacun.

A chaque groupe sa salle de classe, son paperboard et son assortiment de post-its multicolores : la méthode d’émergence des idées s’avère extrêmement bien rodée.
Bien que nous en ayons abondamment discuté plus tôt, c’est l’occasion de remettre à plat les envies, les idées de chacun, sous la forme de mots-clés : à chaque mot son post-it, à chaque « thème » sa couleur (plateforme, outil, thème). Tous ces petits carrés de couleur commencent ensuite à s’agencer d’eux-mêmes et à s’organiser selon une timeline de plus en plus précise.
Durant cette phase de débroussaillage, toutes les demies heures environ un des mentors du TFLab vient nous interrompre pour nous demander où nous en sommes. Ces interruptions intempestives nous forcent en réalité à sans cesse reformuler et clarifier notre proposition. Chacun des mentors ayant en plus sa propre spécialité (project management pour Hannah, application pour Agoston, game design pour Corrado), ce mini pitch round se révèle étonnamment productif et enrichissant pour les projets, et permet de mesurer combien on peut progresser en un après-midi.

Après un passage dans les mythiques thermes de Budapest et un dîner sous le signe du ballon rond (vocation européenne du TFLab oblige), la seconde session de développement se révèle plus ardue encore. Cette fois, les mentors finissent par débouler dans chaque salle pour exiger un pitch impromptu. L’exercice de l’elevator pitch : comment improviser en quelques minutes la mise en forme orale de son projet, sans support ni préparation, alors même que son projet ne réside pour l’instant que sous la forme de schémas et de petits papiers reliés par des flèches ?

L’exercice nous permet au moins de mieux accueillir la seconde nouvelle du jour : il va falloir recommencer à pitcher dès le lendemain matin, cette fois devant tout le groupe. Encore une occasion de parvenir à formuler et synthétiser son projet en dix minutes et quelques slides.

Le prochain article me permettra de mieux développer les projets. En attendant, on peut d’ores et déjà annoncer que la cuvée 2012 des projets TFlab devrait comprendre une vidéo interactive et musicale à la première personne, un ARG gourmand à l’échelle européenne et enfin une plateforme collaborative et artistique visant à rematérialiser notre rapport à l’objet.
En bonus de la part de Julia Fryett, sera aussi développé cet été dans le sein du TFLab un site curateur des projets interactifs et transmedia du monde entier, venant ainsi pérenniser les œuvres découvertes durant ce workshop.

Rendez-vous pour la suite du 9 au 13 juillet à Paris aux Gobelins. Au programme : design d’applications, développement des interfaces techniques et un premier pitch professionnel face à plusieurs membres actifs du secteur transmedia français.

 

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auteur Oriane Hurard

Actuellement chargée de coordination de Transmedia Immersive University, laboratoire de formation et de création initié par Jérémy Pouilloux (La Générale de Production). Auparavant, Oriane a passé neuf mois chez Happy Fannie en tant que Community manager sur le feuilleton transmedia "Fanfan2, Quinze ans après". Encore avant, elle a écrit son mémoire de fin d’études sur l’écriture transmedia dans la fiction française, avec lequel elle a été diplômée du Master de Production Audiovisuelle et Numérique de l’Ina SUP